Il fallait au moins ça pour me faire sortir de ma tanière perdue au fin fond de la banlieue parisienne. Les Teenagers sont en ville, alors la moindre des choses est d'aller vérifier sur place si ce groupe a priori très excitant n'est pas une ultime baudruche fluo relou (qui ne s'est pas excité ne serait-ce que 3 secondes sur Yelle, les Klaxons ou Teki Latex me jette la première pierre). Pourquoi The Teenagers ont l'air cool? D'abord ils sont déjà trop vieux pour être vraiment des teenagers, donc ouf, on n'a pas affaire ici à des putasses de 12 ans. Ensuite parce qu'ils ont ce côté faussement ironique et goguenard à la Calvin Harris, pour l'attitude. Et qu'au fond d'eux ce sont de sympathiques geeks attachants et sincères (comme Calvin Harris). Enfin la musique : des tubes pop qui s'enchaînent les uns à la suite des autres, d'une simplicité et d'une bêtise inouïes, mais qui marqueront l'année de ceux qui attendent aussi de la musique qu'elle soit parfois une régression consentie et pleine de bravoure (car il faut le faire, être un groupe français et utiliser des synthés, citer Kylie Minogue comme influence et chanter en anglais avec cet accent ridicule). En plus, les Teenagers sont cool parce que les rabat-joies les détestent, les fans de Renan Luce vont les détester, les lecteurs de Pitchfork qui ont acheté l'édition collector à 1000 dollars de "In rainbows" de Radiohead les détestent déjà, et ça, ça n'a pas de prix.
Jeudi soir à la Maroquinerie, on comprend qu'on assiste aux premiers vrais moments de début de semi-gloire d'un groupe que toute la presse encense mais que personne n'a encore vraiment écouté. Ils jouent et doivent se dire "Haha mais qu'est-ce qu'ils foutent là si nombreux à nous écouter jouer nos chansons à la con?". Le public est jeune évidemment, mais pas seulement. Les gens sont souriants et communiquent leur plaisir d'être là. On se tape pas des heures de train de banlieue un soir de semaine pour aller se coltiner un énième groupe de rock chiant quand on a 17 piges, que papa et maman sont un peu loin de la première ligne de métro et qu'on n'a pas un budget extensible. Evidemment, tous les gamins présents avaient téléchargé l'album depuis 2 mois sur soulseek et se sont fait le look geek du petit guitariste asiatique (les fameuses grosses lunettes cerclées de noir - évidemment maintenant j'en veux une paire). Le concert fut assez bref (car de l'aveu du même guitariste, ils ne savaient pas encore jouer toutes les chansons de l'album), et se termina par leur tube "Homecoming" avec le public monté sur scène dans une ambiance de boum des années 80 assez bon enfant. Car les Teenagers ne crachent pas sur leur public ou ne leur balancent pas le contenu de leur bière à laggle (le chanteur se désaltérait d'une mini bouteille de Cristaline) : ici on ne joue pas à faire son Pete Doherty, et pourtant on est quand même immensément cool. Les Teenagers sont l'alternative, la vraie, enfin. Ils plaisent aux filles mais ne font pas de la soupe comme les Kooks, ils plaisent aux gays mais pour leur musique pour une fois (pas juste à cause de leur jean moule-bite). Ils ont une BATTEUSE qui est à la fois classe, mimi, sobre et efficace. Ils dégagent le charisme de mecs avec qui on voudrait être potes, à qui on roulerait bien une petite pelle en soirée. Ils sont comme toi et moi, sauf qu'ils sont géniaux et que leur album tue. C'est une bonne définition de ce que devrait être le rock indé en 2008 et ça fait un moment qu'on s'en éloignait tristement.