Il est toujours fascinant de regarder vaciller un mastodonte, il n'y a qu'à voir le succès du film Titanic. C'est la raison pour laquelle beaucoup d'entre nous se sont fadés samedi soir la cérémonie des NRJ Music Awards : le goût du sang, l'appât du fail, l'attraction malsaine que l'on a pour les choses déchues. L'omnipotent conglomérat NRJ-TF1-Universal a régné en maître pendant toute une décennie, à coup de Star Academy et de cérémonies telles que les NRJ Music Awards. Il fallait en être, sinon c'était la mort assurée (la radio était passée maître dans l'art du lobbying et du boycott d'artistes si ceux-ci ne se pliaient pas à leurs exigences). Aujourd'hui, les trois géants se retrouvent dans une situation critique : TF1 n'a plus la main mise sur les audiences, NRJ se fait lâcher par ses "stars" (Madonna et Farmer ont quitté le navire après des dizaines d'années de sponsoring très lucratif), et Universal ont vu leurs artistes de variétés disparaître progressivement des charts au profit d'artistes "de niche", "indés" du genre Charlie Winston (oui pour les gens du métier, Charlie Winston, c'est indé, même si ça fait sourire).
La cérémonie des NMA, c'est du fake à tous les étages, des tractations en coulisses, de la propagande old school, comme si les grands décisionnaires n'avaient pas encore compris que plus personne n'était dupe. D'autant que les NMA se doivent d'être une vitrine du Midem, le témoin de la bonne santé du marché, et l'on sait très bien qu'il est à l'agonie, le marché. Mais ça n'empêchera pas Nikos de se faire plaisir en cabotinant non stop, en chantant avec Michael Bublé, en enchaînant les sketches navrants. Ca fait plaisir de voir qu'il y en a au moins un qui s'amuse.
Cette année, les NMA auraient tout aussi bien pu s'appeler les Guetta Music Awards, tant le sympathique DJ mi golden boy, mi grabataire, avait placé ses titres partout au cours de la soirée : "I gotta feeling" des Black Eyed Peas, "When love takes over" et "Sexy bitch" ont été joués lors de la cérémonie. Apparition de sa poule Cathy pour remettre un prix, et surtout, NRJ award du meilleur album de l'année, devant Lady Gaga et Beyoncé (LOL). Le faux jeune Vivelle Dop s'est d'ailleurs fendu d'un discours merveilleux et larmoyant : "J'espère qu'en 2009 je vous aurai laissé un petit souvenir de bonheur avec un de mes titres". Hahaha... Je dois avouer qu'à défaut de surkiffer les productions Guetta qui nous ont lessivé le cerveau toute l'année, le vrai bonheur c'est de voir le vieux blondinet effectuer son fameux playback de DJ. Genre je fais semblant de mixer derrière mes platines pendant que Kelly Rowland hurle à tue-tête, je lève les bras en l'air avec un sourire hilare, etc. Parfois on se demande même si David n'est pas convaincu lui-même qu'il mixe vraiment lors du playback, car il fait tellement bien semblant que c'en est confondant.
Le reste de la cérémonie est du même tonneau. Kamel Ouali n'arrive pas à lire ses fiches et se plante sur le nom d'un gagnant (grand classique de la cérémonie, c'est la seconde fois consécutive que ça arrive), les troubadours variétoches s'enchaînent (Mozart l'Opéra Rock, Christophe Maé, Gérald de Palmas), tandis que les "stars internationales" viennent faire acte de présence, recevant des prix inventés à la dernière minute (Beyoncé et Robbie Williams sont repartis avec un award d'honneur sortant d'on ne sait où).
Mais le grand moment de la soirée, c'est l'arrivée de Diam's sur scène qui entame un titre chiant de son dernier album, fait mine de se barrer "Ouais ça me soule cette cérémonie", pour mieux revenir 3 secondes après déguisée en oursonne (WTF) et interpréter une chanson gogole et régressive ("Moi jveux pas être grande, non non") qui laissa tout le monde bien perplexe. Pendant 30 secondes on espérait qu'elle allait vraiment planter l'émission, mais non, on a juste eu droit à un titre complaisant et racoleur. Moué.
La grande absente de la soirée, évidemment, c'était Lady Gaga, en pleine tournée. Cette cérémonie nous a montrés à quel point Lady Gaga est indispensable à toute remise de prix ou émission de variétés, car Rihanna sur scène reste chiante comme la pluie. Comme chaque année, les NRJ Music Awards étaient pathétiques, rances et tristes (avec une audience tellement mauvaise que l'émission de Patrick Sébastien a fait mieux), mais l'année prochaine je serai encore devant ma télé, jusqu'à ce que mort s'ensuive.