La magie des chaînes de la TNT, c'est qu'au sein même des programmes les plus cheap, les séries les plus multidiffusées et les "fillers" de tous horizons, chacun peut y trouver son compte, sans avoir nécessairement l'impression de fouiller dans les poubelles. Le charme de la TNT, c'est cette multitude de concepts d'émissions DIY souvent foireux, parfois lumineux, qui redonnent aux adeptes du petit écran le goût de l'aventure et de la découverte, la zappette à la main. L'exemple le plus brillant de cette nouvelle génération de divertissements low profile qui s'avèrent pourtant passionnants, c'est la version française de X Factor.
A l'annonce de ce projet d'adaptation de la franchise anglaise sur W9, il y avait de quoi être franchement sceptique voire carrément hilare. Alors que nos voisins british ont fait de cette émission une redoutable machine de guerre pop, avec des audiences ahurissantes, un statut proche du culte, et un jury incroyablement glam (Cheryl Cole et Dannii Minogue, ça fait beaucoup pour une seule rangée de people), la version française propose Julie Zenatti ou Marc Cerrone... On a le droit de loller quand même.
D'autant que les castings annoncent d'emblée la couleur : notre X Factor à nous sera La Nouvelle Star version Doctissimo : des moches, des vieux, des freaks, et de la variète, soit tout ce que Lio et Manoukian ont soigneusement écrêmé ces trois dernières saisons. On n'avait plus l'habitude d'entendre des shampouineuses du Lavandou s'époumoner sur du Garou, la Nouvelle Star ayant réussi le tour de force de nous faire croire que la France n'était soudainement peuplée que de folkeux à mèches reprenant du Patti Smith. Retrouver nos copines caissières de Créteil Soleil entonner à tue-tête des tubes de Goldman, l'air de rien, ça a la châleur de retrouvailles avec des êtres chers qui nous manquaient un peu. Mais on se disait aussi que le show courait à la catastrophe. On avait tort.
Julie Zenatti, je ne connais pas très bien sa discographie, voire pas du tout même, et j'imagine que ça ne doit pas être très glorieux. Mais force est de constater qu'en tant que membre du jury et coacheuse, elle crève l'écran. Pendant les castings, on la déteste avec ses réflexions trop méchantes. En gros, dès qu'elle ouvre la bouche ou jette un regard, elle provoque des crises de larmes chez nos copines du bac à shampoing. Mais au fil du programme on se rend compte qu'elle a un cœur gros comme ça, qu'elle pousse les candidats a aller au bout d'eux même, etc. Et alors qu'on s'apprêtait à regarder le show au second degré en ricanant, on se prend à suivre le truc comme un bon feuilleton, un peu comme lors de Popstars saison 1, chef d'œuvre inégalé de storytelling pour télé-crochet.
On peut se moquer de cette version beauf de la Nouvelle Star, n'empêche que l'objet est bien fichu et fédérateur. M6 ont eu le flair de proposer déjà une émission qui plaira à la fois à la France d'en bas et au Parisien blasé, et qui remplace la Star Academy, grande absente de la rentrée, au pied levé. Et on se surprend à attendre de pied ferme les primes, et voir des secrétaires de direction à la retraite reprendre "Ella elle l'a". Tout mais plus de reprises du "Hallelujah" de Leonard Cohen.